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Homo sapiens : une conception du temps et de l'humanité
1 janvier 2010

La mémoire, un enjeu ?

La mémoire est fondatrice dans la société d'Homo sapiens. A titre individuel, elle est un instinct. A titre collectif, elle est un fait de culture.

En France, la mémoire est une culture partagée par le grand public : commémorations publiques et privées, généalogie désormais démocratisée, célébrations du millénaire capétien puis du bicentenaire de la révolution française, ouvrages, reportages télévisés, plaques commémoratives, reconstitutions de batailles, et autres manifestations.

Certains prennent appui sur cette nouvelle culture pour moraliser l'histoire sous le prétexte qu'aujourd'hui l'homme est meilleur et qu'hier il aurait dû réagir comme aujourd'hui. Oui, les fautes et les erreurs des hommes doivent être étudiées, analysées et intériorisées afin de ne pas se reproduire, mais n'oublions pas que nous aussi nous faisons des erreurs en croyant bien faire et que nous serons sévèrement jugés par les générations futures. En 1918, dans l'Europe dévastée, on clamait "La der des ders".

La mémoire est une notion à géométrie variable. Certains ne veulent se souvenir que des réussites, d'autres plutôt des échecs. On peut en tirer des leçons ou non. La mémoire peut rassembler ou diviser. La mémoire est l'un des caractères de l'histoire. La mémoire peut permettre de débuter un processus d'améliorations, de progrès. Pour cela, il faut avoir un but. La mémoire n'est pas seulement un sentiment émotif. Elle est un instrument de pouvoir et d'influence redoutable. Elle permet de façonner une société, d'orienter une évolution, de conditionner, d'instruire à charge et à décharge, de dominer autrui. Le pouvoir politique se sert de la mémoire pour imposer telle ou telle orientation au corps social. La mémoire peut être une forme de violence. La mémoire peut être libératrice ou oppressive. La mémoire, c'est aussi la capacité de dire non. La mémoire est inné et acquis.

Un danger cependant nous guette car la mémoire est généralement sélective et interprétative. Elle opère un tri et pas seulement entre les vivants et les morts, mais bel et bien entre les vivants eux-mêmes. La mémoire est identitaire. 

De temps à autre, au nom de la mémoire des voix s’élèvent pour demander une société plus juste, plus harmonieuse, mieux équilibrée, mais la mémoire est aussi la multitude des interprétations, un vaste champ de conflits potentiels, un ferment de dissolution pour une société. La mémoire est un enjeu de civilisation.

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